« Jamais je n'aurais songé en parler »
Élisabeth est venue expérimenter le Codéveloppement. Elle travaille dans une grande administration comme responsable logistique. Elle est venue pour voir, par curiosité. Elle a d'abord suivi une
première journée, avec 5 autres participants qu'elle ne connaît pas, en interentreprises. Elle sort de la journée avec beaucoup de satisfaction, heureuse d'avoir été utile pour les deux « clients
» de ce jour-là, et de découvrir l'approche.
Elle est revenue pour une seconde journée aujourd'hui. Est-ce le climat de confiance ? Est-ce la garantie de confidentialité ? Est-ce la méthode de recherche de sujets ? Est-ce le sentiment d'un
cadre protecteur et bienveillant ? Elle se surprend soudain à mettre sur la table « son » sujet, sans l'avoir vraiment prévu. Un sujet qui lui pèse beaucoup dans son travail comme dans sa vie
privée, et qu'elle n'exprime à personne, depuis des années. Elle souffre d'une très mauvaise audition. Elle n'en parle jamais. Ni à ses collègues, ni même à ses enfants. Elle « jongle » pour que
cela ne se perçoive pas. Depuis des années. Mais « jongler » n'est pas une solution, c'est même un frein pour son efficacité dans le travail. Aujourd'hui elle met le sujet sur la table : comment
être à la fois « bien » et efficace avec cette forte gêne ?
Avec le groupe elle va avancer vers diverses options, mais elle a bien sûr fait le plus difficile en en parlant. Elle reviendra le mois suivant, transformée, libérée.
Ainsi, un client qui déclare après la séance : « Je ne pensais pas en parler.Je ne pensais même pas être client », « Vous êtes les premiers à qui j'en parle », « Même mon conjoint ne sait pas que
je rencontre telle difficulté », combien de fois est-ce arrivé ? Il ne s'agit pas bien sûr de confidences personnelles mais de difficultés professionnelles, bien consistantes. Et qui vont enfin
trouver une voie d'élaboration, un chemin.
Reprendre la main
Un équipier « négatif »
Bertrand dirige une équipe commerciale. Son sujet porte sur l'efficacité commerciale. « Je n'arrive pas à créer cette dynamique » souligne t'il.
A mesure des questions, il apparaît que, si l'équipe est moyenne dans ses compétences, le frein vient surtout de ce sacré Marcel, ce fidèle collaborateur. Il aime bien Marcel cependant, car « bon relationnel », et homme qui « aime son métier. Mais pour Marcel tout est compliqué », il se dit déjà « au maximum » des efforts possibles, se met souvent trop à la place du client et de ce fait trouve toujours des points faibles, bien entendu insurmontables, dans les produits.
Finalement, la recherche des priorités amène Bertrand à se positionner nettement au moment du contrat : « Si seulement déjà il arrêtait de tout critiquer en réunion .Il me « bousille » mes réunions depuis des mois. J'ai voulu lui faire comprendre mais il le prend mal, comme si je voulais l'empêcher de participer »
Et la séance se déroule.
Faisons un saut tout de suite à la séance du mois suivant.
C'est le moment du débriefing avec Bertrand.
– « Alors ? Du nouveau par rapport à Marcel ?
– Tout va bien
– Quoi, il ne vous gêne plus ?
– Plus du tout !
– Mais il s'est passé quoi ?
– Très simple. Je l'ai pris à part. Je lui ai dit qu'il « bousillait » notre réunion. Que cela me gênait beaucoup. Que je lui demandais de stopper définitivement les chapelets de critiques en public. De me les dire en privé, avant ou après, comme il veut.
– Et ?
– Et il le fait déjà depuis 4 réunions. Je me sens mieux. L'équipe va mieux. On a fait de bonnes réunions. Et Marcel participe !! J'aurais dû faire ça depuis longtemps!! »
Bertrand a repris la main, il a retrouvé son influence, sa capacité à piloter. Certains ferons remarquer que 2 séances de coaching, ou un bon séminaire d'affirmation de soi, auraient pu produire le même résultat, voir mieux. Ils auraient raison. Mais ils oublieraient quelques points clés :
– ce sont d'autres managers qui ont « coaché » leur collègue ;
– ils ont appris ce que veut dire accompagner ou coacher ;
– ils ont pris confiance dans leur capacité à accompagner ;
– ils ont développé leur capacité à le faire ;
– ils ont appris qu'un manager peut demander de l'aide à d'autres managers ;
– les lignes de solidarité et de communication transverses se sont ouvertes ;
– chacun découvre qu'il peut questionner la "fatalité" à laquelle il s'était habitué ou résigné.
Le plus important, disent les concepteurs canadiens, ce n'est pas la résolution du problème. C'est l'apprentissage de tous !